Dans un contexte où devenir propriétaire semblait hors de portée, Christina Miles et Rohan Tully ont décidé de sortir des sentiers battus et de construire eux-mêmes la maison de leurs rêves.

Leur projet un peu fou a pris vie lorsque, avec beaucoup de détermination, ils ont transformé une vieille péniche en une magnifique maison sur l’eau. Partons à la découverte de leur oasis flottante et du parcours inspirant qui les a menés jusqu’ici…

Adaptation française par Aurélie Blain

Alors qu’ils vivent dans un petit appartement en plein cœur de Londres, Christina et Rohan rêvent de leur maison idéale. Un après-midi, alors qu’ils se promènent le long des berges de la Tamise, Christina demande en plaisantant à Rohan s’il pense pouvoir vivre dans l’un de ces vieux bateaux délabrés que l’on trouve sur les grandes voies navigables. Ce qui n’est qu’une remarque légère de Christina prend un tournant inattendu lorsque Rohan répond par l’affirmative, donnant naissance à leur projet audacieux : transformer une péniche en maison de rêve.

Vivre sur une péniche semble être une suite naturelle pour le couple. « Rohan est un passionné de bateaux. Il a grandi dans cet univers et a beaucoup navigué avec ses parents, explique Christina. De mon côté, je n’ai aucune expérience en la matière, mais Rohan a toujours eu envie de vivre sur un bateau ». Après une brève discussion, ils prennent la décision de concrétiser ce rêve et optent pour une grande péniche plutôt qu’un petit bateau fluvial.

La première étape consiste à repérer dans Londres un amarrage suffisamment spacieux pour accueillir la péniche de leurs rêves. « Il faut trouver un emplacement où amarrer le bateau avant même de commencer sa rénovation, précise Rohan. Nous avons eu beaucoup de chance de tomber sur un emplacement tout juste aménagé. Le timing a joué en notre faveur ».

Une fois la question de l’amarrage résolue, Rohan se met en quête d’une péniche. Après avoir contacté plusieurs courtiers, il découvre une embarcation de 40 mètres datant de 1965, située de l’autre côté de la mer du Nord, en Belgique. Accompagné de son père et de quelques amis, il récupère le bateau et l’envoie aux Pays-Bas pour entamer les travaux d’aciérie nécessaires à sa transformation.

Malgré son énorme potentiel, ce projet de rénovation se heurte à un défi de taille : « Une fois le bateau sorti de l’eau, nous avons dû le raccourcir de 10 mètres en son centre pour s’adapter à l’amarrage, conçu pour des embarcations de 30 mètres », explique Christina.

Les premiers travaux débutent aux Pays-Bas, où la coque est réparée et adaptée pour accueillir les principaux éléments de l’aménagement intérieur.

Christina et Rohan doivent alors concevoir rapidement l’architecture intérieure afin de découper le puits de lumière et les escaliers directement dans le châssis en acier, pendant que la péniche est encore au chantier. « On avait entre les mains une vieille dame robuste, admirablement conçue, parfaite pour servir de base à notre maison , se remémore Rohan. Une fois cette étape achevée, le bateau est rapatrié dans le Kent, en Angleterre, pour la suite des travaux, avant de rejoindre son emplacement définitif à Londres.

Pour être habitable, la péniche doit être lestée de ciment, ce qui va améliorer sa stabilité et l’enfoncer un peu plus dans l’eau. « En augmentant son poids, le bateau bouge moins et s’intègre mieux dans son environnement, notamment parmi les immeubles voisins », détaille Christina.

Mais cette étape critique se transforme en une véritable course contre la montre. Le camion transportant le ciment arrive en retard, ce qui laisse au couple seulement 90 minutes pour couler et niveler le ciment, avant que la marée ne redescende.

Avant de pouvoir s’attaquer à l’intérieur de la péniche, Christina et Rohan doivent isoler ce qui n’est à l’origine qu’une coque métallique. Pour assurer un confort optimal, ils isolent les murs avec de la mousse projetée, renforcée par un film multicouche.

« On pense souvent qu’il fait toujours froid sur un bateau, mais c’est faux. Nous l’avons construit comme une maison classique, avec un chauffage au sol. Nous ne passons pas nos soirées à grelotter sur l’eau », rassure Christina.

Le couple décide de superviser lui-même cette transformation, profitant des compétences de Rohan en gestion de projet. Pendant les travaux, Christina découvre qu’elle est enceinte et son congé maternité lui permet de se rendre régulièrement à Londres pour participer aux décisions importantes au moment des finitions. Si un professionnel est engagé pour la plomberie et l’électricité, le couple se charge de la majorité des travaux, épaulé par des amis.

Après des mois de travaux éprouvants et pas moins de sept déménagements avec leur bébé pendant cette période, le couple finit par emménager à bord de leur nouvelle maison flottante, juste avant le premier confinement au Royaume-Uni.

« Ça n’a pas été simple pour nous de venir travailler deux jours par semaine sur le bateau, mais cette époque est désormais derrière nous, raconte Rohan. Le confinement est tombé à pic, car nous n’avions rien d’autre à faire que de terminer les travaux ».

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Après 15 mois de travail acharné en vivant au gré des déménagements avec un nouveau-né, la péniche est enfin achevée. D’un vieux navire rouillé, elle s’est métamorphosée en une habitation élégante sur deux étages, avec trois chambres et tous les équipements nécessaires pour accueillir une famille.

Pour un coût d’amarrage comparable au loyer d’un deux-pièces en plein Londres, ce bateau de 52 m² offre une superficie bien plus généreuse.

Christina, qui n’avait que peu d’expérience en matière de bateaux, a beaucoup appris durant la phase de conception. « Je voulais beaucoup de choses et Rohan devait réfléchir aux moyens de les rendre possibles. J’ai par exemple souhaité avoir une cheminée centrale dans le salon, mais cela aurait impliqué de faire ressortir le conduit par le pont », explique Christina. Une fois les défis techniques résolus, il ne restait plus qu’à créer un tableau d’inspiration pour chaque pièce.

Avec un budget serré, le couple a opté pour des solutions économiques afin d’aménager leur maison flottante. Leur superbe cuisine utilise des modules IKEA, habillés de façades sur mesure que Christina et Rohan ont trouvées chez Superfront, une enseigne suédoise.

Le plan de travail en quartz s’accorde parfaitement avec l’îlot central, orné d’un motif géométrique contemporain.

Contre toute attente, la cuisine située à l’étage est devenue le lieu préféré de la famille. « C’est la pièce où l’on profite le plus de la vue sur le fleuve , explique Rohan. « Elle est tellement lumineuse, et la vue est incroyable. On ne pensait pas que cette pièce deviendrait aussi importante pour nous », ajoute Christina.

Tout au long du projet, le couple s’est efforcé de respecter son budget serré. « J’essayais toujours de trouver des alternatives moins coûteuses pour concrétiser mes idées, confie Christina. J’ai déniché beaucoup d’articles à prix cassé pendant le Black Friday. Et si je tombais amoureuse d’un meuble en particulier, je comparais les prix en ligne pour trouver le revendeur le moins cher ».

Ils ont aussi fabriqué certaines pièces eux-mêmes, comme leur remarquable table de salle à manger. Cette table provenait de l’ancien appartement de Rohan. Ils l’ont raccourcie et lui ont ajouté des pieds trouvés sur Etsy pour lui donner une nouvelle allure.

Toute la maison est baignée de lumière grâce aux grands hublots et au puits de lumière dans le salon. Cependant, ces ouvertures ont représenté un véritable défi pour trouver des rideaux ou des stores adaptés.

Après mûre réflexion, Christina et Rohan ont décidé d’installer des corniches sur toute la longueur du bateau, dissimulant des stores enrouleurs discrets et des lumières LED pour une finition élégante et raffinée.

Elara, la fille du couple aujourd’hui âgée de deux ans, grandit dans un cadre idyllique à bord de leur péniche. « Les gens s’étonnent souvent qu’on puisse vivre avec un bébé dans un tel environnement, mais une fois à l’intérieur, cela ressemble beaucoup à un appartement, souligne Christina. Nous avons installé des verrous de sécurité sur les fenêtres et avons sécurisé le pont, comme on le ferait pour un balcon .

La chambre d’Elara et sa salle de jeux sont de véritables petits paradis, parfaits pour s’épanouir. L’un des murs, peint dans un élégant ocre profond, s’accorde parfaitement avec les étagères, la table et les chaises IKEA, et sa boîte à outils miniature. Le plafond, quant à lui, est habillé d’un papier peint à pois, pour une touche originale.

Christina a apporté sa touche personnelle à la décoration et au mobilier de cette superbe maison familiale. Parmi les éléments les plus remarquables, on trouve une lampe unique, née d’une idée qu’elle a concrétisée avec créativité.

Elle partage sur son compte Instagram : « J’ai fait reproduire ce néon inspiré du film du même nom… Notre électricien n’arrêtait pas de plaisanter en disant que, parmi toutes nos installations astucieuses, c’est celle-là qui mettrait le feu au bateau. Mais comment résister à une si bonne affaire ? »

Vivre sur l’eau implique de gérer, entre autres, l’effet des marées. Comme leur péniche est nouvellement amarrée, il faudra un certain temps avant qu’elle ne s’ancre correctement dans la vase à marée basse.

Christina et Rohan ont ainsi dû réaménager leur chambre à la dernière minute, pour éviter de dormir la tête en bas. La banquette sous le hublot, le mur orné de cadres et la couverture aux motifs géométriques font de cette chambre un espace chaleureux et apaisant.

La suite parentale reflète parfaitement l’ingéniosité et le sens de l’économie du couple. « Nous avons fabriqué notre meuble de salle de bain à partir d’un buffet vintage, surmonté d’un plateau en quartz », explique Christina.

Sur une péniche, entre les parois en acier qui se contractent et se dilatent, et l’impossibilité d’utiliser un niveau à bulle, de nombreux ajustements ont dû être réalisés à l’œil.

Achevé en dernier, le pont, qui offre une vue imprenable sur les péniches de l’ouest londonien, fait office de jardin pour le couple. Sa conception s’articule autour d’un puits de lumière en verre trempé, capable de supporter le poids de plusieurs personnes.

Bien que Christina et Rohan s’estiment extrêmement chanceux de vivre sur une péniche, ils regrettent tout de même certains aspects d’une maison plus conventionnelle.

« Une chose que je regrette, c’est l’absence d’un cabanon. Nous avons beaucoup travaillé pour maximiser les espaces de rangement, notamment sur le pont, mais un cabanon extérieur serait un vrai plus ! » explique Christina.

Le dernier projet du couple consiste à proposer leur péniche à la location sur Airbnb. Si cette maison flottante unique vous a séduit, sachez que vous pouvez y séjourner pour environ 450 £ (545 €) la nuit !

Dans leur annonce, on peut lire : « Reconnectez-vous à la nature lors d’une escapade inoubliable. Cette péniche design et fonctionnelle a été décrite par le célèbre architecte et présentateur britannique George Clarke comme l’une des plus belles qu’il n’ait jamais vues ».

Depuis la fin des travaux, le couple a lancé Isla Yachts, une entreprise spécialisée dans la rénovation de péniches. Après avoir rencontré tant de spécialistes et artisans talentueux au cours de leur aventure, ils ont décidé de mettre leur expérience au service d’autres passionnés. Avec une péniche aussi impressionnante comme carte de visite, nul doute qu’ils ne manqueront pas de clients !

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