Quel est le véritable poids des syndicats dans 30 pays ?
Panorama de la force syndicale à travers le monde
Les taux d’affiliation syndicale varient de manière extrême dans le monde. Certains pays interdisent purement et simplement les syndicats, avec un taux de 0 %, tandis que d’autres dépassent les 90 %. En règle générale, un taux d’adhésion élevé s’accompagne de meilleurs salaires, d’une protection accrue, de conditions de travail plus sûres et d’une plus grande égalité entre femmes et hommes.
Cependant, les détracteurs du syndicalisme affirment que ces organisations peuvent entraîner une hausse des coûts, peser sur la productivité et la compétitivité, et provoquer des perturbations économiques majeures, notamment par la grève ou le lock-out..
Poursuivez votre lecture pour découvrir comment se répartissent les taux d’affiliation syndicale dans 30 pays, du plus faible au plus élevé, selon les données internationales les plus récentes.
Adaptation française par Laëtitia Lord
30. Émirats arabes unis : 0 %
Aux Émirats arabes unis, la législation interdit la création de syndicats et ne reconnaît ni le droit de négocier collectivement, ni celui de faire grève. Le ministère du Travail dispose d’un pouvoir étendu pour réprimer tout mouvement collectif. Il peut non seulement dissoudre les grèves mais aussi sanctionner leurs participants, notamment par la suspension du permis de travail et l’expulsion du pays.
Toujours en vigueur, le système de la kafala lie le droit de séjour et l’autorisation de travail des travailleurs migrants à leur employeur. Ce mécanisme favorise une dépendance totale vis-à-vis du sponsor et limite drastiquement la mobilité professionnelle.
En pratique, cela expose nombre de travailleurs, en particulier les ouvriers du bâtiment, les employées de maison et les agents de sécurité, à des abus récurrents, par exemple confiscation de passeports, non-paiement des salaires, journées de travail interminables. Selon de nombreux rapports d’organisations internationales comme Human Rights Watch, ces pratiques s’apparentent à du travail forcé et placent les personnes concernées dans une précarité extrême.
29. Malaisie : 6 %
En 2025, selon les estimations syndicales, seuls 6 % des travailleurs sont syndiqués, un chiffre conforme aux 5,8 % officiellement recensés en 2022.
Ce taux extrêmement bas s’explique en partie par le manque d’information des salariés sur l’existence des syndicats. Par ailleurs, les dispositions du projet de loi sur les syndicats de 2022, qui assimilent certaines activités syndicales à des crimes contre l’État ou à des actes de terrorisme, ont suscité de vives inquiétudes quant à l’avenir du mouvement syndical.
Malgré ce contexte, plusieurs avancées majeures ont été obtenues : en 2023, les restrictions sectorielles à l’organisation syndicale ont été abolies ; en 2024, les règles discriminatoires sur l’adhésion ont été supprimées ; enfin, en 2025, les syndicats affiliés à IndustriALL Global Union ont signé un mémorandum pour renforcer la coordination et promouvoir l’adhésion syndicale.
28. Colombie : 6,1 %
En 2022, seuls 6,1 % des travailleurs en Colombie étaient membres d’un syndicat d’après les enquêtes nationales sur le travail, une légère hausse comparée aux 4,7 % enregistrés en 2019, mais ce chiffre demeure parmi les plus faibles du monde.
La Colombie reste l’un des pays les plus dangereux pour le syndicalisme : depuis 1989, plus de 3 000 syndicalistes y ont été assassinés et la grande majorité de ces crimes sont restés impunis. Entre 2020 et 2022, au moins 37 meurtres de syndicalistes ont été recensés.
En 2025, une réforme du travail a été adoptée dans le but d’améliorer les conditions de travail, tandis que des propositions ont été soumises pour renforcer les libertés syndicales, étendre le droit de grève et améliorer la négociation collective. Cependant, le Congrès a rejeté ces dispositions et elles n’ont pas été intégrées au texte final de la loi.
27. Philippines : 6,6 %
En 2024, les Philippines occupent toujours la quatrième place mondiale des pays ayant le plus faible taux de syndicalisation, mais avec une chute marquée de 8,5 % en 2020 à seulement 6,6 % en 2024. Cette tendance contraste avec la Colombie et la Malaisie, où la part des salariés syndiqués a au contraire légèrement augmenté sur la même période.
Ce recul de la syndicalisation s’explique principalement par une répression syndicale persistante, le développement du travail informel après la pandémie, ainsi que la pratique du red tagging, c’est-à-dire l’étiquetage des syndicalistes comme « communistes » ou insurgés, qui dissuade de nombreux travailleurs d’adhérer à un syndicat.
L’Indice mondial des droits 2023 de la Confédération syndicale internationale classe le pays parmi les dix pires au monde pour les travailleurs, aux côtés du Bangladesh, de la Biélorussie, de l’Équateur, de l’Égypte, de l’Eswatini, du Guatemala, du Myanmar, de la Tunisie et de la Turquie. Le red tagging continue d’exposer les syndicalistes à des arrestations arbitraires, des enlèvements, des violences et même des assassinats.
26. Brésil : 8,4 %
En 2023, seuls 8,4 % des actifs occupés au Brésil, soit environ 8,4 millions de travailleurs, étaient affiliés à un syndicat. Ce chiffre marque le niveau le plus bas depuis le début des relevés en 2012, où le taux était alors de 16,1 %. Cette baisse est nette par rapport aux 11 % observés en 2019 et aux 9,2 % en 2022.
Selon l’Institut brésilien de géographie et de statistiques (IBGE), cette chute s’explique par plusieurs facteurs : la réforme du travail de 2017, qui a rendu les cotisations syndicales facultatives, la montée de l’emploi informel et la généralisation des contrats flexibles, ainsi qu’un recul du poids des secteurs traditionnellement plus syndiqués comme l’industrie, les transports et la fonction publique. Par ailleurs, le nombre d’adhérents a diminué dans tous les groupes professionnels, y compris dans le secteur public, où le taux est passé de 19,9 % en 2022 à 18,3 % en 2023.
25. France : 8,9 %
En 2024, le taux de syndicalisation en France se situe à 8,9 % des actifs occupés, d’après le Labour Rights Index 2024. On observe un recul par rapport aux 10,3 % relevés en 2019, baisse notamment attribuable au faible taux d’adhésion dans le secteur privé.
Ce faible taux de syndication s’explique largement par le modèle français : la loi étend les conventions collectives à près de 98 % des salariés, réduisant ainsi l’incitation à rejoindre un syndicat. D’autres facteurs jouent également, comme la fragmentation syndicale, la difficulté à fédérer les travailleurs temporaires ou en situation précaire, ainsi que le faible enracinement dans le secteur privé.
Pour autant, la France se caractérise par une intense activité syndicale. Elle affiche le plus grand nombre de jours de grève en Europe. Lors des mobilisations contre la réforme des retraites en 2023, les syndicats phares comme la CGT et la CFDT ont chacun gagné environ 10 000 nouveaux adhérents.
24. États-Unis : 9,9 %
Le taux de syndicalisation aux États-Unis a atteint son niveau le plus bas en 2024 : seuls 9,9 % des salariés étaient syndiqués, contre 10,1 % en 2022. Malgré ce déclin, le pays a connu un regain d'intérêt pour l'organisation du travail, les syndicats étant de plus en plus présents dans des entreprises telles qu'Amazon et Starbucks et ayant organisé des grèves importantes dans des secteurs tels que l'automobile et le divertissement, avec la Screenwriters Guild of America et la SAG-AFTRA.
Selon l’ITUC Global Rights Index, en janvier 2025, le président Donald Trump a procédé à la révocation du conseiller général et de l’un des trois membres du National Labor Relations Board (NLRB). Cette décision a privé l’agence de son quorum, paralysant de facto son fonctionnement. Or, le NLRB est l’organisme chargé de garantir le droit des travailleurs à s’organiser, à négocier collectivement, et de sanctionner les pratiques de travail frauduleuses. Un juge fédéral a ordonné la réintégration du membre révoqué en mars 2025.
23. Mexique : 12,4 %
La densité syndicale au Mexique s’établissait à 12,4 % des salariés en 2020, selon l’OCDE et le Labour Rights Index 2024 (dernière donnée officielle disponible).
Depuis l’entrée en vigueur de l’accord T-MEC, le pays a réformé sa législation du travail afin de favoriser des syndicats plus démocratiques et transparents. D’après Labor Notes, un média américain spécialisé dans les mouvements ouvriers et syndicaux, le syndicalisme indépendant au Mexique a enregistré des avancées notables, avec la signature de conventions collectives authentiques dans des usines de General Motors et Panasonic, ainsi que des victoires dans des entreprises maquiladoras du nord du pays.
Des défis subsistent néanmoins. La résistance du patronat, l’inertie des syndicats blancs et la nécessité d’étendre ces progrès à un plus grand nombre de secteurs continuent de freiner la consolidation du mouvement syndical indépendant au Mexique.
22. Espagne : 12,4 %
L’adhésion syndicale en Espagne reste relativement faible par rapport aux standards européens : seuls 12,4 % des salariés étaient syndiqués en 2019, selon le Labour Rights Index 2024, soit la donnée la plus récente et fiable disponible au niveau international.
Depuis, le gouvernement de coalition progressiste a rétabli les conventions collectives de branche, renforçant ainsi la négociation collective. S’il n’existe pas de chiffres officiels plus récents sur la densité syndicale, les cinq principales confédérations (CCOO, UGT, CSIF, USO et CGT) ont enregistré près de 60 000 nouvelles adhésions entre 2021 et 2023, d’après les données publiées par le quotidien Público. Cette progression est attribuée aux avancées salariales et sociales obtenues durant cette période.
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21. Australie : 13,1 %
En août 2024, 13,1 % des salariés australiens étaient syndiqués, contre 12,5 % en 2022, selon le Bureau australien des statistiques. « Cette hausse, la plus importante depuis deux générations, s’explique surtout par l’arrivée de jeunes adhérents, avec une progression de 53 % chez les 15-24 ans et de 22 % dans la tranche des 25-34 ans », souligne l’Australian Council of Trade Unions (ACTU).
Pendant des décennies, la densité syndicale avait reculé parallèlement au remplacement de l’application collective du droit du travail par un système individualisé, moins efficace pour prévenir les abus tels que le wage theft (vol de salaires) ou l’exploitation de travailleurs vulnérables. Depuis 2023, le gouvernement travailliste d’Anthony Albanese a relancé la négociation collective et renforcé les droits des salariés grâce à des réformes comme la loi Secure Jobs, Better Pay (« Emplois sûrs, meilleurs salaires », adoptée en 2022), contribuant ainsi à cette reprise.
20. Nouvelle-Zélande : 14,5 %
Contrairement à l’Australie voisine, l’adhésion syndicale a progressé ces dernières années. Selon le ministère des Entreprises, de l’innovation et de l’emploi (MBIE), on comptait, au 1er mars 2024, 425 761 adhérents aux syndicats enregistrés, soit 14,5 % des salariés du pays. Un chiffre modeste comparé à d’autres économies développées, mais qui se maintient depuis 2022, après une période de croissance tirée par les jeunes travailleurs.
Comme l’explique Gordon Anderson, professeur émérite à l’Université Victoria de Wellington, dans un article publié en 2024 dans Employment Law Bulletin No. 6, le mouvement syndical néo-zélandais reste marqué par les réformes néolibérales des années 1990, qui en ont réduit la portée dans le secteur privé.
Aujourd’hui, il est toutefois dominé par de puissants syndicats du secteur public, avec une présence croissante des femmes et un intérêt renouvelé pour des thèmes tels que l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, l’égalité salariale et la sécurité psychosociale.
19. Suisse : 14,8 %
En Suisse, 14,8 % des salariés étaient syndiqués en 2018, soit une baisse de plus de 20 % par rapport à l’an 2000. S’il n’existe pas de chiffres plus récents sur la densité syndicale, la Fédération suisse des syndicats (USS) comptait 315 790 adhérents en 2023.
Selon l’USS, après avoir payé leurs impôts et leur loyer, les ménages à revenus faibles et moyens disposent aujourd’hui de moins d’argent qu’en 2016, ce qui laisse présager une « décennie perdue » pour le pouvoir d’achat de ces groupes.
Selon son rapport 2024, les hauts salaires ont progressé tandis que les cantons ont réduit la fiscalité des revenus les plus élevés. L’organisation réclame donc des hausses substantielles de salaires, en particulier dans les « professions féminisées », ainsi qu’une réduction des primes d’assurance maladie, qu’elle considère comme un impôt régressif.
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18. Japon : 16,1 %
D’après la dernière enquête Basic Survey of Trade Unions du ministère japonais de la Santé, du travail et des affaires sociales, 16,1 % des salariés étaient syndiqués en 2024, soit le taux le plus bas depuis le début des statistiques en 1947. Ce chiffre marque un recul de 0,2 point par rapport à 2023 et illustre l’érosion continue de la densité syndicale, particulièrement marquée dans les petites et moyennes entreprises, où elle ne dépasse pas 0,7 %.
Comme le rapporte le Wall Street Journal, malgré ce déclin, le syndicalisme japonais a obtenu des avancées notables : lors du shuntō 2024, la traditionnelle ronde annuelle de négociations salariales, les hausses obtenues ont avoisiné 5,4 %, soit le plus fort relèvement en 34 ans, porté par la pression inflationniste, la pénurie de main-d’œuvre et la hausse du coût de la vie.
17. Allemagne : 16,3 %
S’il n’existe pas d’estimations officielles récentes sur la densité syndicale en Allemagne, l’OCDE situe la dernière donnée disponible (2019) à 16,3 %. Ce taux est en recul par rapport aux décennies précédentes, mais la couverture conventionnelle reste élevée : environ 42 % des salariés bénéficient d’une convention de branche et 8 % d’accords d’entreprise, soit près de la moitié de la population active.
Comme le rapporte l’agence de presse Reuters, dans un contexte d’inflation et de crise des coûts, les grèves de 2024 et 2025 — dont la grève générale du 26 mars 2025, qui a paralysé trains, avions et transports publics — montrent que, malgré la baisse enregistrée ces dix dernières années, le syndicalisme allemand conserve un poids considérable dans la négociation salariale et la capacité de mobilisation sociale.
16. Inde : 19,8 %
Il n’existe malheureusement pas de données officielles récentes sur la densité syndicale en Inde après 2017. Cette année-là, elle s’élevait à 19,8 %. Bien que le soutien public aux syndicats y soit relativement faible, le pays a connu des grèves massives, comme celle de mars 2022, qui a rassemblé près de 50 millions de travailleurs.
Selon la revue académique International Labour Review (2022) et une analyse publiée dans Migration Letters (2024), même si le nombre total d’adhérents a progressé depuis 2002, le syndicalisme indien a perdu de sa capacité de mobilisation et reste largement absent d’une grande partie du marché du travail. Cette exclusion limite à la fois son pouvoir de négociation et son influence politique.
15. Royaume-Uni : 22 %
L’adhésion syndicale au Royaume-Uni a connu de forts soubresauts. À son apogée en 1979, elle s’est effondrée sous les gouvernements antisyndicaux de Margaret Thatcher et de John Major dans les années 1980 et 1990, avant de décliner plus lentement jusqu’à aujourd’hui.
Selon le Statistical Bulletin du Department for Business and Trade du gouvernement britannique, la densité syndicale parmi les salariés du pays est tombée à 22 % en 2024, son niveau le plus bas depuis le début des statistiques comparables. Faute de données officielles pour 2023, la tendance était déjà manifeste en 2022, lorsque le taux avait atteint un plancher historique de 22,3 %.
Comme le rapporte le quotidien britannique indépendant The Guardian, la crise du coût de la vie a déclenché une vague de mobilisations syndicales dans le pays. En réaction, le gouvernement conservateur a fait adopter la Strikes (Minimum Service Levels) Act 2023, qui impose aux secteurs clés comme la santé et les transports d’assurer un service minimum pendant les grèves.
Cette législation a été vivement critiquée par la commission parlementaire conjointe sur les droits de l’homme, par des organisations de défense des libertés civiles, ainsi que par l’Organisation internationale du travail (OIT), qui estiment qu’elle restreint des droits fondamentaux tels que le droit de grève.
14. Singapour : 22,2 %
À Singapour, 22,2 % des salariés étaient syndiqués en 2019, selon les dernières données comparables disponibles sur la densité syndicale. S’il n’existe pas de taux plus récent, la National Trades Union Congress (NTUC), unique centrale syndicale du pays, a annoncé en avril 2025 avoir franchi le cap des 1,4 million d’adhérents, signe de ses efforts pour maintenir et élargir sa base.
Contrairement à de nombreux pays, les grèves y sont extrêmement rares en raison d’une législation du travail très stricte. Au cours des dernières décennies, seules deux grandes grèves ont été recensées, en 1986 et en 2012.
13. Irlande : entre 22 et 25 %
En Irlande, la couverture de la négociation collective est nettement plus limitée. En 2025, la densité syndicale est estimée entre 22 % et 25 %, selon des données récentes de Unite the Union Ireland, l’un des syndicats les plus importants et actifs au Royaume-Uni et en Irlande. En 2020, elle avoisinait encore 27 %, ce qui traduit un léger recul au cours des dernières années.
La couverture des conventions collectives s’élevait à environ 34 % en 2024, bien en deçà de l’objectif de 80 % fixé par la nouvelle directive européenne. En avril 2025, le gouvernement irlandais a lancé une consultation publique en vue d’élaborer un plan national destiné à encourager la négociation collective entre syndicats et entreprises. L’initiative vise à renforcer la représentation des travailleurs et à élargir la couverture conventionnelle dans les années à venir.
12. Autriche : 26 %
En Autriche, la densité syndicale était d’environ 26 % en 2020, dernière donnée officielle disponible.
Selon Eurofound, la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, organisme de l’Union européenne spécialisé dans la recherche sociale et professionnelle, l’adhésion syndicale suit une tendance à la baisse depuis plusieurs décennies. Le pays conserve toutefois l’une des couvertures de négociation collective les plus élevées au monde. Environ 98 % des salariés sont couverts par des conventions de branche, ce qui garantit des conditions de travail satisfaisantes, même pour ceux qui ne sont pas syndiqués.
11. Russie : 27,5 %
En Russie, la densité syndicale était estimée à 27,5 % en 2017, selon l’OCDE. Faute de données officielles plus récentes, le constat demeure celui d’un syndicalisme formel fragile.
D’après des enquêtes du Centre russe de recherche sur l’opinion publique (VCIOM), citées par le site d’analyse politique Russia Explained (2023), 53 % des travailleurs estiment que les syndicats ne défendent pas efficacement leurs droits et seuls 2 % affirment qu’ils feraient appel à eux en cas de violation de leurs conditions de travail.
Par ailleurs, selon une analyse du European Labour Law Network, bien que la Constitution russe garantisse la liberté syndicale, de sérieux obstacles entravent dans les faits la création et l’action des syndicats indépendants, de même que l’exercice du droit de grève, ce qui limite fortement leur capacité de représentation.
10. Canada : 28,3 %
En 2024, la densité syndicale au Canada s’élevait à 28,3 %, contre 29 % en 2022, selon les données du Center for Economic and Policy Research (CEPR).
Ces derniers mois, le pays a connu une intense activité syndicale. En novembre 2024, quelque 55 000 employés de Canada Post ont mené une grève nationale, selon Reuters ; en décembre 2024 et janvier 2025, le front commun syndical Common Front a organisé d’importants arrêts de travail dans le secteur public québécois, touchant notamment l’éducation et la santé ; et en janvier 2025 s’est achevé l’un des plus longs conflits sociaux de l’histoire canadienne à l’aéroport de Vancouver.
Cet accord, rapporté par le média canadien CBC News, a permis d’obtenir des hausses salariales, des garanties renforcées en matière d’emploi et une amélioration de la couverture médicale pour le personnel de l’hôtel de l’aéroport.
9. Afrique du Sud : 29 %
Au deuxième trimestre 2023, 29 % des travailleurs sud-africains, soit plus de 3,8 millions de personnes, étaient syndiqués, selon la South Africa Trade Fact Sheet du Congrès des syndicats sud-africains. L’adhésion est légèrement plus élevée chez les hommes (29,8 %) que chez les femmes (28,1 %), et atteint des niveaux très élevés dans certains secteurs, comme les mines (82,5 %).
Cette progression par rapport aux années précédentes s’explique par la consolidation de la représentation syndicale dans des secteurs clés, ainsi que par les avancées des conseils de négociation sectoriels (bargaining councils), qui ont élargi la couverture et renforcé les droits des travailleurs, y compris dans les entreprises où tous les salariés ne sont pas directement syndiqués.
8. Italie : 32,5 %
Selon l’European Trade Union Institute (ETUI), l’Italie compte plus de syndiqués que tout autre pays de l’Union européenne, même si près de la moitié d’entre eux sont des retraités, ce qui ramène la densité syndicale parmi les actifs à environ un tiers. D’après la base de données de l’OCDE, ce taux atteignait 32,5 % en 2019, dernier chiffre disponible.
Parallèlement, l’ITUC Global Rights Index, publié par la Confédération syndicale internationale, alerte sur un recul de la protection des travailleurs. En 2025, le gouvernement d’extrême droite de Giorgia Meloni a proposé de criminaliser les manifestations et grèves qui bloqueraient des routes ou voies ferrées, avec des peines de six mois à deux ans de prison, et d’autoriser la police à utiliser des dispositifs de surveillance lors d’opérations de maintien de l’ordre. En réaction, des syndicats comme la CGIL-FILCAMS ont manifesté dans plusieurs grandes villes, dont Turin.
7. Chine : 44,3 %
En Chine, la densité syndicale s’élevait à 44,3 % en 2017, dernier chiffre disponible.
D’après une étude publiée en 2024 dans la revue China Economic Quarterly International, la couverture syndicale y est bien plus importante dans le secteur public que dans le privé. Mais, dans les deux cas, tous les syndicats doivent être affiliés à la Fédération nationale des syndicats de Chine (ACFTU), placée sous contrôle étatique.
L’ITUC Global Rights Index 2025 souligne qu’il n’existe pas de syndicats indépendants et que les travailleurs sont contraints d’adhérer aux organisations officielles. Malgré cela, les grèves et mobilisations sociales ont repris de l’ampleur après la pandémie, révélant des tensions salariales et des inégalités persistantes.
6. Belgique : 49,1 %
Près de la moitié des salariés en Belgique étaient syndiqués en 2019, avec une densité de 49,1 % selon l’OCDE. Le pays figure ainsi parmi ceux qui affichent le plus fort taux d’adhésion syndicale au sein de l’Union européenne, avec une couverture collective avoisinant 96 %.
Cependant, l’ITUC Global Rights Index 2025 publié par la Confédération syndicale internationale alerte sur des reculs en matière de libertés syndicales. Une nouvelle loi criminalise les « attaques malveillantes contre l’autorité de l’État » lors de manifestations, malgré les objections de l’Institut fédéral des droits humains. Par ailleurs, le nouveau gouvernement de coalition dirigé par le parti de droite néolibéral N-VA pousse à la judiciarisation des interdictions de rassemblements publics. Dans le même temps, plusieurs militants de la Confédération des syndicats chrétiens (CSC-ACV) ont été arrêtés lors d’une grève contre la privatisation d’une chaîne de supermarchés.
5. Norvège : 50 %
La Norvège demeure l’un des pays au monde où la densité syndicale est la plus élevée. Selon des données actualisées publiées dans la revue académique Nordic Economic Policy Review 2025, la moitié des salariés norvégiens étaient syndiqués en 2023, un taux resté stable depuis 2010.
Dans cette étude, Anders Kjellberg, professeur émérite à l’Université de Lund, en Suède, souligne que cette stabilité — à la différence du recul observé dans d’autres pays nordiques — s’explique en grande partie par la forte présence des syndicats sur les lieux de travail. Le contact direct avec des représentants et collègues syndiqués entretient l’adhésion comme norme sociale et facilite le recrutement. En Norvège, 40 % des membres déclarent avoir adhéré grâce à un représentant ou un collègue, et 30 % via leur affiliation étudiante.
4. Finlande : 55 %
Selon le Nordic Economic Policy Review 2025, la densité syndicale en Finlande atteignait 55 % en 2021, contre 58,8 % en 2018. Si elle reste l’une des plus élevées au monde, elle enregistre néanmoins un léger recul ces dernières années.
D’après l’ITUC Global Rights Index 2025, le gouvernement de coalition de droite dirigé par Petteri Orpo a adopté en 2024 une série de lois restreignant fortement le droit de grève. Les grèves politiques sont désormais limitées à 24 heures, l’action solidaire est réduite et les sanctions financières contre les syndicats et les salariés ont été durcies, ce qui fragilise la tradition de coopération tripartite du pays.
3. Danemark : 68 %
Malgré un léger recul ces dernières années, le Danemark affichait encore une densité syndicale de 68 % en 2023, contre 67 % en 2019, selon les données publiées dans le Nordic Economic Policy Review 2025 déjà cité. Le pays conserve par ailleurs l’une des couvertures conventionnelles les plus étendues au monde, avec plus de 80 % des salariés couverts par des accords collectifs.
Ce soutien se reflète aussi dans son classement à l’ITUC Global Rights Index 2025, où le Danemark figure parmi les pays de tête en matière d’égalité entre les sexes et de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.
2. Suède : 68 %
Selon l’étude de l’Université de Lund déjà citée, la densité syndicale en Suède s’élevait à 68 % en 2023. Un chiffre légèrement en retrait par rapport aux 68,9 % enregistrés en 2022, mais qui demeure l’un des plus élevés au monde, près de 90 % des salariés étant couverts par des conventions collectives.
Tout n’est toutefois pas idyllique dans ce pays souvent présenté comme un modèle de congés parentaux. En 2024, l’entreprise d’Elon Musk, Tesla, a refusé de signer une convention collective avec le syndicat IF Metall et a enfreint la législation suédoise en faisant venir du personnel d’autres ateliers européens pour remplacer les grévistes, allant même jusqu’à licencier un salarié qui avait participé au mouvement, selon l’ITUC Global Rights Index 2025.
1. Islande : 92,2 %
L’Islande détient le record mondial de syndicalisation. Toute personne qui travaille ou presque est membre d’un syndicat. En 2020, 92,2 % des salariés y étaient affiliés et une proportion similaire bénéficiait de conventions collectives. Selon l’OCDE, la négociation salariale constitue une pièce maîtresse de son économie, contribuant à maintenir un faible niveau d’inégalités, une forte inclusion et une réduction maximale de l’écart salarial entre les sexes.
Mais il y a un « secret » : comme le souligne une étude de l’Université de Lund, la loi impose à tous les salariés islandais de verser des cotisations syndicales directement prélevées sur leur salaire, qu’ils soient syndiqués ou non. Cette particularité a permis de préserver et même de renforcer la densité syndicale au fil des décennies, un modèle que d’autres pays nordiques observent avec une certaine envie.
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