L’incroyable cathédrale d’un seul homme : le projet fou d’une vie
Un homme, une cathédrale

L’ancien moine Justo Gallego Martinez a passé 60 ans à construire une cathédrale gigantesque à Mejorada del Campo, près de Madrid. Jusqu’à ses 96 ans, il a créé à lui seul l’un des édifices les plus étonnants du monde à partir de matériaux recyclés, alors qu’il n’avait aucune expérience dans le domaine de la construction. Mais sa mort, survenue en novembre 2021, avant l’achèvement de la cathédrale, a laissé en suspens le projet de toute une vie.
Cliquez ou faites défiler la galerie pour découvrir l’histoire de cet homme remarquable et de sa cathédrale bien-aimée…
Adaptation française par Laure Bartczak
Une vie de dévotion

L’incroyable histoire de Justo Gallego Martinez, connu sous le nom de Don Justo, commence à la fin de la guerre civile espagnole, en 1939. Cette année-là, Il décide d’abandonner sa carrière d’ouvrier agricole pour se consacrer à Dieu.
Moine novice à 27 ans, il rejoint le monastère Santa Maria de Huerta à Soria, dans le nord de l’Espagne. Il y passe huit années heureuses avant que sa vie monastique ne s’achève prématurément.
Changement de direction

En 1961, à l’âge de 36 ans, Don Justo contracte la tuberculose, l’obligeant à renoncer à sa vie religieuse. Sans autre choix, il retourne dans sa ville natale de Mejorada del Campo, où il hérite d’une parcelle agricole – un terrain qui s’avérera idéal pour construire.
Ébranlé par cet échec spirituel, il décide alors de poursuivre son chemin de foi à sa manière…
Engagement spirituel

Don Justo fait alors un vœu solennel : s’il retrouve la santé, il édifiera une cathédrale sur le terrain qu’il vient d’acquérir.
Plus qu’un travail à plein temps, la construction sera pour Don Justo son ultime offrande à Dieu. Il promet de consacrer sa propriété à la Vierge Marie si son projet aboutit, elle qu'il a invoquée dans les moments les plus difficiles de sa maladie.
Un homme de parole

Don Justo tient sa promesse. Une fois complètement rétabli, il se consacre corps et âme à son ambitieux projet.
Sans connaissances architecturales, sans expérience en matière de construction et sans véritable budget, il entame les travaux préparatoires quelques semaines plus tard. La première brique est posée sur le site le 12 octobre 1961, date symbolique du calendrier hispanique dédiée à la Vierge Marie.
Un nouveau souffle

Don Justo est photographié ici à l’âge de 58 ans, en 1983 – soit un peu plus de 20 ans après le début de son extraordinaire projet.
Sans plans architecturaux, ni même d’esquisses préalables, il s’attaque à la construction de front : cet ouvrage est la vocation de sa vie.
Une architecture harmonieuse

L’homme de foi ne sait pas exactement à quoi ressemblera la cathédrale une fois achevée, mais il a en tête un schéma approximatif de son agencement.
Il confiera plus tard à l’architecte britannique George Clarke qu’il a toujours eu en tête les proportions, les mesures et l’harmonie de l’édifice.
Inspiration divine

Dans le documentaire The Madman and the Cathedral (qui se traduit en français par « Le fou et la cathédrale »), Don Justo affirme que sa principale source d’inspiration a toujours été Dieu.
En quête d’inspiration

Malgré ses connaissances limitées, Don Justo est déterminé à construire sa cathédrale dans les règles de l’art. Il s’inspire de l’architecture néoclassique et des fortifications espagnoles traditionnelles. Il aurait même été influencé par la basilique Saint-Pierre du Vatican.
Défier les pronostics

Nombreux sont ceux qui voient dans le projet de Don Justo l’œuvre d’un fou, persuadés qu’il n’aboutira jamais. Pourtant, il leur prouvera le contraire.
Il consacre tout son héritage familial à cette construction, vendant jusqu’à ses biens personnels et sa propre maison pour poursuivre les travaux. Sans réelle expertise en bâtiment et privé de soutien financier, il élabore des techniques ingénieuses, à la fois économiques et peu conventionnelles.
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Une pensée créative

Non seulement impressionnant par son ampleur, mais aussi hautement innovant, ce projet pourrait être perçu comme un modèle de construction durable.
Don Justo a créé ses propres outils, se sert de ses mains pour certains travaux de plâtrerie et transforme tout ce qu’il peut trouver en matériaux recyclés – y compris de vieux pneus en caoutchouc et des bidons métalliques ayant contenu des déchets chimiques, qu’il utilise pour former les imposantes colonnes de la cathédrale.
Une générosité débordante

Après avoir travaillé seul pendant de nombreuses années, Don Justo attire l’attention d’entreprises et de particuliers fascinés par son courage et sa détermination.
Grâce à sa notoriété dans la région, l’ancien moine reçoit des matériaux récupérés provenant d’habitations démolies, d’usines et de chantiers de construction situés à proximité. Certaines entreprises locales l’aident également par des dons financiers, ce qui lui permet de poursuivre son projet.
C’est en bâtissant qu’on devient bâtisseur

Quant aux travaux de construction eux-mêmes, Don Justo apprend sur le tas. Pendant son temps libre, il étudie des livres sur les églises et les châteaux médiévaux pour cultiver son imagination et se former aux techniques de construction traditionnelles.
Il travaille seul pendant plus de dix ans, sans échafaudage professionnel ni même grue. En 1975, il constate des progrès lorsque les premiers contours de la structure commencent à se dessiner.
Des coups de main bienvenus

Cette histoire inspirante fait parler d’elle. Tour à tour, des bénévoles et des admirateurs viennent offrir leur aide, de petits dons à quelques heures de travail ici et là. Les six neveux de l’ancien moine l’aident dans des travaux essentiels, tels que la pose des poutres structurelles fragiles du dôme.
En 1992, le gros œuvre de la cathédrale est en place. Puis, en 1998, un habitant de la région, Angel Lopez Sanchez, rejoint le projet en tant que principal assistant de Don Justo.
Ange gardien

Artisan qualifié, Angel crée les magnifiques vitraux sur mesure de la cathédrale, à partir de morceaux de verre récupérés, offerts par une entreprise locale.
Angel s’occupe aussi des sols de l’édifice, qu’il fabrique à partir de plaques de marbre de récupération. Il libère ainsi Don Justo, qui peut alors se consacrer à l’élément décoratif majeur de la cathédrale : son magnifique dôme central.
L’ultime chef-d’œuvre

Le dôme de la cathédrale est sans conteste la pièce la plus emblématique de l’édifice. Inspirée de celle qui coiffe la basilique Saint-Pierre de Rome, la réplique de Don Justo mesure 40 mètres de hauteur et 12 mètres de diamètre.
Par ailleurs, le bâtisseur amateur construit en plus une série de petites chapelles, de cloîtres et de logements en face de la cathédrale principale.
Charme rustique

Semblable à un château de conte de fées, la superbe cathédrale de Don Justo ne ressemble à aucune autre au monde. Décorée de tourelles et de tours à l’architecture unique, la façade présente des briques apparentes et des arcs en plâtre rustiques faits à la main.
Fabriquée à partir de chutes provenant d’usines et de matériaux excédentaires, chaque brique utilisée pour construire l’édifice est gracieusement offerte à Don Justo par une briqueterie voisine, ce qui lui permet d’économiser des milliers d’euros sur les coûts de construction.
Une façade époustouflante

En contraste avec la maçonnerie robuste de la façade, la cathédrale dévoile plusieurs dômes extérieurs élégants reposant sur des piliers imposants.
Réalisés à l’aide de tôles et de verres de récupération soigneusement transformés en éléments décoratifs, ces détails architecturaux donnent vie à l’édifice, qui scintille sous le soleil espagnol.
Une entrée grandiose

À l’intérieur, l’ampleur de ce monument auto-construit est saisissante. La nef principale, couvrant un espace de 2 230 mètres carrés, s’étend sur deux étages, tandis que l’impressionnante coupole façonnée par Don Justo capte tous les regards.
Matériaux de récupération

Partout, le regard se pose sur de belles peintures et mosaïques religieuses, dont beaucoup ont été réalisées à la main à partir de matériaux de récupération.
Un chef-d'œuvre architectural

La cathédrale suit un plan commun à toutes les cathédrales chrétiennes traditionnelles : un clocher, un autel, des cloîtres et des arcades.
Des escaliers en béton coulé à la main permettent d’accéder à des pièces et à des étages secrets, y compris le toit. Depuis le dernier étage, on admire la vaste cour de Don Justo, ornée de dizaines de coupoles réalisées de manière artisanale.
Entre traditions et modernité

Mélange d’architecture classique raffinée et de génie créatif, cette cathédrale inspirante témoigne du talent de Don Justo pour redonner vie à de vieux matériaux abandonnés.
Six jours par semaine, l’ancien moine se levait à trois heures et demie du matin pour travailler sur son édifice. Il passait environ dix heures sur place et ne se reposait que le dimanche.
L’œuvre de toute une vie

Le complexe comprend un baptistère, une salle paroissiale et une vaste crypte située sous la nef principale du bâtiment, où Don Justo souhaitait reposer.
Une dernière volonté

Le 28 novembre 2021, Don Justo décède à l’âge de 96 ans. Il s’était résigné au fait qu’il ne verrait pas l'aboutissement de ce projet, œuvre d’une vie entière. Sa dernière volonté était que quelqu’un prenne la relève et achève le travail.
Le produit fini

Ce modèle 3D montre à quoi pourrait ressembler la cathédrale une fois achevée. Les deux tours principales devront être développées pour s’élever au-dessus de l’édifice actuel et guider les fidèles vers l’entrée.
Don Justo espérait obtenir des bancs pour sa congrégation, ainsi qu’un pupitre, une chaire et un orgue pour accompagner ses fonts baptismaux en marbre, qui se trouvent au centre de la nef de la cathédrale.
Projet menacé

Il s’agit probablement de l’un des projets d’autoconstruction les plus incroyables au monde. Cette photo, prise en 2006, montre l’état de l’intérieur 45 ans après le début du projet.
La cathédrale fut alors menacée de démolition. Selon Don Justo, l’Église catholique avait refusé de l’acquérir pour soutenir son projet, stipulant que le bâtiment était trop dangereux pour accueillir les fidèles. Mais l’aide ne tarda pas à venir…
Soutien extérieur

En 2018, une start-up créative du Royaume-Uni utilise la cathédrale pour organiser une exposition sur la technologie et l’art. Par la suite, les fondateurs de l’entreprise proposent d’aider Don Justo et Ángel à achever le bâtiment en toute sécurité.
L’année suivante, ils mettent en place la campagne One Man Cathedral pour aider Don Justo à collecter 40 000 euros – le coût estimé pour rendre la propriété légalement sûre pour le public. Depuis, la plupart des sols en marbre de l’édifice ont été achevés.
Un rêve devenu réalité

En 2019, la cathédrale accueille sa toute première messe dominicale, l’un des souhaits les plus chers de Don Justo.
Dans le documentaire The Madman and the Cathedral, on peut entendre Don Justo déclarer : « Chaque jour me comble… Je suis heureux de penser à ce que j’ai déjà accompli. Je continuerai, jusqu’à la fin de mes jours, à travailler sur l’édification de cette cathédrale ».
Il tint parole et poursuivit cette incroyable construction jusqu’à sa mort.
Une entrée remarquée

L’histoire de Don Justo a progressivement fait le tour du monde. Une exposition lui sera dédiée au musée d'Art moderne (MoMA) de New York et il sera également interviewé par The New York Times.
Don Justo et sa cathédrale sont également présentés dans une saison de l’émission britannique George Clarke’s Amazing Spaces, où l’architecte renommé décrit son parcours comme « un petit rêve de construction devenu le projet d’une vie ».
Une bénédiction non officielle

Étonnamment, Don Justo n’a jamais demandé de permis de construire officiel pour sa cathédrale et aucun permis officiel ne lui a jamais été délivré.
Cependant, les autorités de la ville ont donné à Don Justo leur bénédiction officieuse, en baptisant la rue où se trouve le bâtiment « Calle Antonio Gaudí », du nom de l’architecte espagnol décédé en pleine construction de la basilique de la Sagrada Família à Barcelone, une structure qui n’est toujours pas achevée à ce jour, tout comme celle de Don Justo.
Les messagers de la paix

En mai 2021, Justo et Ángel font don de la cathédrale à l’organisation « Mensajeros de la Paz », (« Messagers de la paix » en français), une ONG catholique qui vient en aide aux plus démunis dans plus de 50 pays, fondée par Padre Ángel (ici en photo).
Une architecture inventée

L’ONG nettoie les dégâts, aplanit les fissures, renforce les arches et érige des murs. Selon le journal britannique The Guardian, elle envoie également quelques-uns des meilleurs ingénieurs structurels d’Espagne sur le site.
Les ingénieurs auraient été « agréablement surpris » par l’œuvre de Don Justo, malgré son manque de connaissances en matière de construction. « C’est comme s’il avait inventé l’architecture dans sa tête », a observé l’un d’eux.
Lieu de rassemblement

Comme le montre cette photo prise en 2023, la cathédrale devient suffisamment solide pour servir de lieu de célébration et de culte.
Ici, des fidèles se rassemblent pour rendre hommage à Don Justo à l’occasion du deuxième anniversaire de sa mort.
The heart of his community

Se dressant fièrement au cœur de cette localité espagnole, la cathédrale est un remarquable rappel de ce que l’on peut accomplir avec une persévérance inébranlable et un peu de foi.
Quant aux regrets, Don Justo n’en avait aucun. En réalité, il avait confié à la BBC il y a quelques années : « Si je devais revivre ma vie, je referais cette cathédrale, mais en plus grand ».
L’œuvre d’une vie

Justo Gallego Martínez s’éteint le 28 novembre 2021, mais sa cathédrale tient toujours debout, ouverte au public sept jours sur sept. Sur son site web officiel, la Catedral Justo est décrite comme « un lieu d’accueil pour tous » et « un espace où les différentes religions peuvent se rencontrer ». Ce projet de 60 ans, fruit d’une passion inébranlable, est devenu une oasis pour les habitants de la région.
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