De nombreuses infrastructures essentielles du monde moderne sont enfouies sous nos pieds. Conçues pour garantir un transport sécurisé, acheminer de l’eau potable ou protéger les populations face aux catastrophes naturelles, ces constructions souterraines jouent un rôle vital.
Voici 20 tunnels emblématiques qui ont révolutionné nos modes de vie et de déplacement et dont les coûts de construction, souvent vertigineux, témoignent de prouesses d’ingénierie hors norme.
Tous les montants sont indiqués en dollars US, ajustés à l’inflation pour les projets antérieurs à 2022.
Adaptation française par Aurélie Blain
Le tunnel de Shamulada a été inauguré en 1970 dans le cadre de la ligne ferroviaire chinoise Chengdu-Kunming. Le projet comprenait six ponts et onze tunnels, mais la section de tunnel de 6,4 km visible sur cette photo a été de loin la plus difficile à réaliser pour des raisons géologiques. En effet, le tracé passait sous des chaînes de montagnes et des ravins, et rencontrait même des nappes phréatiques.
Il s’agissait également à l’époque du plus long tunnel jamais construit en Chine. Les travaux d’excavation se sont déroulés de 1959 à 1966 et le coût total du projet reste à ce jour inconnu.
D’importants travaux souterrains menés entre 1980 et 2008 ont permis la construction de deux accélérateurs de particules du CERN, en Suisse : le Grand collisionneur électron-positon (LEP) et le Grand collisionneur de hadrons (LHC).
Le LEP, désactivé en 2000, nécessitait notamment un tunnel circulaire de 27 km de long, creusé à 100 mètres de profondeur à l’aide de trois tunneliers distincts suivant une trajectoire courbe continue. Pour le LHC, mis en service en 2008, l’infrastructure existante a dû être agrandie, avec de profonds puits d’accès et d’immenses cavernes souterraines atteignant 30 mètres de large.
Ces accélérateurs de particules ont contribué à des avancées majeures, telles que le développement d’internet, la protonthérapie contre le cancer et d’importantes découvertes en physique, dont celle du boson de Higgs en 2012, couronnée par un prix Nobel. On ignore quelle part du budget du CERN a été consacrée au creusement des tunnels pour ces projets, mais on sait que le futur collisionneur circulaire (Future Circular Collider), dont le tunnel formerait un cercle de 91 km, est estimé à 18 milliards de dollars (environ 15,5 milliards d’euros), dont un tiers serait dédié aux travaux de creusement.
Construite à 120 mètres sous la surface pour accueillir les matchs de hockey sur glace lors des Jeux olympiques d’hiver de 1994 à Lillehammer, la Gjøvik Hallen est la plus vaste salle publique au monde entièrement creusée en montagne.
La municipalité de Gjøvik, qui avait déjà réalisé l’une des premières piscines souterraines au monde en 1974, a choisi de creuser dans la montagne plutôt que de construire en extérieur. La salle mesure environ neuf étages de haut, occupe tout un pâté de maisons du centre-ville et atteint 120 mètres de profondeur. Totalement invisible depuis la surface, elle n’est accessible que par des tunnels. Environ 170 tonnes de dynamite ont été utilisées pour l’excavation. La salle peut accueillir 6 000 personnes. Les travaux se sont terminés avec trois mois d’avance pour un coût de 135 millions de couronnes norvégiennes, soit environ 23 millions d'euros actuels.
La construction du premier tunnel à double usage au monde, conçu à la fois pour la dérivation des eaux pluviales et les échanges routiers, a commencé en 2003 sous le centre de Kuala Lumpur. Son principe est simple : en l’absence ou en cas de faibles précipitations, la chaussée à deux niveaux reste ouverte à la circulation. Lorsque des pluies importantes surviennent, ces voies ferment pour permettre le stockage des eaux de ruissellement et ainsi éviter des inondations majeures dans la ville. Une fois la tempête passée, les tunnels sont vidangés, nettoyés et rouverts à la circulation.
Pour réaliser cet exploit d’ingénierie, les ouvriers ont utilisé un tunnelier géant de 13 mètres de diamètre afin de creuser le tunnel long de 9,7 km. Depuis son inauguration en 2007, le tunnel SMART (tunnel routier d'évacuation des eaux pluviales) a permis de détourner les eaux de crue à plus de 40 reprises. Ajusté à l’inflation, le coût de construction du tunnel avoisine les 740 millions de dollars (637M€).
En 1958, les travaux d'un tunnel routier entre l’Italie et la France débutent sous les plus hauts sommets des Alpes. Les 10,6 km d’excavation nécessaires représentent alors le double de tout autre tunnel routier et le projet présente plusieurs défis. Son ampleur en est certainement une, mais la géologie complexe ralentit également l’avancement des travaux des deux côtés et requiert plus de 700 tonnes d’explosifs pour traverser la roche.
Le creusement de ce tube unique (8,6 m de large pour 4,35 m de haut) dure quatre ans et les équipes françaises et italiennes arrivent à se rejoindre avec un écart d'axe de seulement 13 centimètres. Cette route à deux voies, la plus profonde du monde, est inaugurée en 1965 dans la plus grande effervescence, pour un coût de plus d'1 milliard de francs de l’époque, soit 710 millions d'euros aujourd’hui. Depuis, plus de 400 millions d'euros supplémentaires ont été investis dans la reconstruction et l'amélioration des systèmes de sécurité du tunnel, après un grave incendie en 1999.
L’idée de creuser un tunnel sous le port de Sydney remonte à 1885. Il aura fallu plus d’un siècle pour la réaliser, mais l’ouvrage, ouvert en 1992, est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands exploits d’ingénierie de l’Australie moderne.
Depuis la rive sud jusqu’à la rive nord, les équipes ont installé un tunnel immergé relié à des galeries creusées sous l’esplanade de l’Opéra de Sydney. Long de 2,3 km, le tunnel a coûté l’équivalent de 840 millions de dollars actuels (723 M€).
Le projet de tunnel de 10 km des chutes du Niagara visait à accroître la capacité de la centrale hydroélectrique Sir Adam Beck à Niagara Falls, en Ontario. Après cinq années de travaux, son achèvement en 2011 a marqué un record. Il a été creusé à l’aide du plus grand tunnelier pour roche dure de l’époque (d'un diamètre de 14,4 mètres), une nécessité pour qui entend détourner une partie du fleuve vers la centrale à un débit capable de remplir une piscine olympique en quelques secondes.
La capacité supplémentaire apportée par ce tunnel permet de fournir de l’électricité à environ 160 000 foyers et d'approcher l'objectif pour la province de fermer ses centrales à charbon. Lors de sa mise en service en 2013, le coût total du tunnel s’élevait à 1,6 milliard de dollars canadiens, soit l’équivalent de 1,3 milliard d'euros aujourd’hui.
Le col suisse du Gothard est depuis des siècles un axe de transport essentiel à travers les Alpes, ce qui explique la longue tradition tunnelière de la région. Les 17 km du tunnel routier du Gothard étant la seule option de passage pour la circulation automobile, celui-ci a été inauguré en septembre 1980, après dix années de travaux à travers des roches instables et des conditions géologiques complexes.
À son ouverture, ce tube unique à deux voies (une dans chaque sens) était le plus long tunnel du monde et permettait une traversée toute l’année. Ajusté à l’inflation, le coût total de sa construction s’élève à 1,6 milliard de dollars (1,4 Md€) et un second tube parallèle est actuellement en cours de creusement afin d’augmenter la capacité du tunnel.
Le Metropolitan Water Reclamation District of Greater Chicago a lancé en 1975 son ambitieux TARP, un plan de création de tunnels et de réservoirs, dont la mise en service progressive s’est étalée de 1981 à 2006. Destiné à lutter contre la pollution de l’eau et les inondations, ce programme comprend quatre vastes réseaux de tunnels souterrains creusés en profondeur et courant sur un total de 177 km.
Depuis sa mise en service, la ville estime qu’environ 95 % des eaux pluviales et des eaux usées auparavant rejetées dans les cours d’eau locaux sont désormais acheminées vers ces égouts profonds pour être traitées. Le TARP est rapidement devenu un modèle pour d’autres projets de lutte contre la pollution dans le monde. Peu d’informations existent sur le coût total du projet, en raison de sa durée et de son ampleur, mais on estime qu'au moins 3 milliards de dollars (2,6 Md€) y ont été investis et la construction des réservoirs n'est toujours pas achevée.
Si ce diaporama vous plaît, ajoutez un like et cliquez sur Suivre en haut de la page pour ne rien manquer des articles signés loveMONEY.
De tous les projets emblématiques de ce diaporama, le tunnel routier à double tube Tuen Mun–Chek Lap Kok de Hong Kong détient le record du plus grand tunnelier jamais utilisé.
Les travaux de réalisation de deux tunnels parallèles de 5 km passant sous la mer ont débuté en 2015, afin de relier l’aéroport au pont Hong Kong-Zhuhai-Macao. Outre leur taille exceptionnelle, ces tunneliers ont dû être spécialement conçus pour résister à des conditions souterraines extrêmes, notamment des sols meubles et une pression d’eau très élevée. L'ouvrage inauguré en 2020 aura nécessité cinq années de travaux pour un coût d’environ 2,7 milliards de dollars, soit près de 2,8 milliards d'euros aujourd’hui.
La vue sur le front de mer de Seattle était autrefois bouchée par le viaduc de l’Alaskan Way. En 2010, un vaste chantier a été lancé pour creuser un tunnel de 17 mètres de diamètre et y insérer une autoroute à deux niveaux, profondément enfouie sous la ville. Le tunnelier utilisé sur place était alors le plus grand du monde (jusqu’à ce qu’il soit détrôné par celui utilisé à Hong Kong) et demeure le plus large jamais employé en Amérique du Nord.
Au-delà de ses dimensions exceptionnelles, le projet a dû faire face à un obstacle majeur : la machine a heurté un tuyau en acier issu d’un ancien puits et s’est retrouvée bloquée dès le début du creusement, ce qui a provoqué un important retard et de nombreux litiges.
Une fois la machine remise en état, le tunnel de 2,8 km a pu être achevé, permettant la démolition du viaduc et la redynamisation du front de mer de la ville. Le coût final de ce projet achevé en 2019 s’est élevé à 3,3 milliards de dollars, soit 3,9 milliards d'euros aujourd’hui.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’Australie a cherché à garantir une alimentation électrique plus fiable. Dans cette optique, le gouvernement a lancé un vaste complexe hydroélectrique et d’irrigation, connu sous le nom de Snowy Mountains Hydroelectric Scheme. Ce complexe d’envergure comprend sept centrales électriques, seize barrages, 225 km de tunnels et d’aqueducs, ainsi que 1 600 km de routes et de voies ferrées. Seulement 2 % de ces installations quasi exclusivement souterraines sont visibles en surface.
Sans surprise, un tel chantier a nécessité 25 ans de construction, débutant en 1949 pour atteindre son plein fonctionnement en 1974. Le projet a mobilisé près de 100 000 travailleurs, dont de nombreux réfugiés venus d’une Europe meurtrie par la guerre à la recherche d'une nouvelle vie. Le coût total de la construction s’est élevé à 820 millions de dollars australiens, soit environ 4,6 milliards d'euros actuels.
Dans les années 1990, la Suisse s’est engagée dans un ambitieux transfert du trafic de marchandises de ses autoroutes vers un réseau ferroviaire traversant la base des Alpes. Ces tunnels de base ont nécessité des travaux de creusement titanesques à travers des formations rocheuses particulièrement complexes, mais ils permettent aujourd’hui de réduire considérablement les temps de trajet.
Le percement du tunnel de base du Lötschberg, près de Berne, a débuté en 1994. Il a abouti à la construction de deux tubes de 34,6 km de long et de 10,4 mètres de diamètre chacun. Les équipes ont dû faire face à de nombreux défis sous les Alpes bernoises, notamment des coups de terrain, des températures élevées et une zone hydrothermale où la pression dépassait les 100 bars. Ce chantier colossal a duré plus de dix ans, et le tunnel pour les trains à grande vitesse a été mis en service en 2007, pour un coût total de 4,3 milliards de francs suisses, soit 4,7 milliards d'euros actuels.
L’Egnatia Odos est l’un des plus grands exploits d’ingénierie de la Grèce moderne et il figure parmi les projets autoroutiers les plus ambitieux d’Europe. Traversant le pays d’ouest en est, elle reprend le tracé de l’ancienne voie romaine qui reliait autrefois l’Italie à la Turquie. L’autoroute s’étend principalement à travers des reliefs montagneux, ce qui a nécessité la construction de 73 tunnels à double tube, totalisant près de 100 km de galeries. Le plus long, le tunnel de Drisko, atteint les 4,6 km.
Lancé en 1994, le chantier a dû composer avec une grande variété de formations géologiques : roches friables, argiles gonflantes, glissements de terrain… Autant de défis techniques relevés au fil des années. L’Egnatia Odos a été mise en service en 2009, pour un coût de 6 milliards d’euros, soit environ 8 milliards actuels.
Pas moins de 51 tunneliers ont été mobilisés pour réaliser les 50 km de tunnels de la ligne 14 du métro de Shenzhen. Comme pour de nombreux projets emblématiques de cette liste, le creusement a traversé une grande diversité de types géologiques, du terrain meuble aux roches les plus dures. Les équipes ont également dû composer avec un environnement urbain dense, entre autres la proximité d’autres lignes de métro, de canalisations, de bâtiments sensibles et de rivières en surface.
Étonnamment, l’ensemble du chantier lancé en 2018 n’a duré que quatre ans. Le coût final du projet est estimé à environ 10 milliards de dollars (8,6 Md€).
Également appelé Trans-Tokyo Bay, ce pont-tunnel constitue un gain de temps considérable pour relier en voiture Kawasaki à Kisarazu, deux villes séparées par environ 100 km et le centre de Tokyo. Le trajet ne prend plus que 15 minutes, grâce à un tunnel de 10 km suivi d’un pont de 5 km.
Lancée en 1989, la construction a mobilisé certains des équipements de creusement les plus imposants jamais utilisés. L’ouvrage, inauguré en 1997, a coûté 11,2 milliards de dollars (9,6 Md€).
L’île artificielle qui relie le pont au tunnel offre une aire de repos avec plateforme panoramique, boutiques, restaurants et autres divertissements.
Cet ouvrage d’ingénierie de 57 km dépasse à lui seul la longueur cumulée du tunnel de base du Lötschberg et de l’ancien tunnel routier du Gotthard. En plus des deux tubes totalisant 152 km, le projet comprenait également deux puits d’accès de 800 m de profondeur. Une section en particulier a contraint les équipes à travailler sous 2300 m de roche, avec des températures pouvant atteindre les 45 °C.
La percée finale a eu lieu en 2010, après dix ans de travaux, faisant du tunnel de base du Gotthard le tunnel ferroviaire le plus long et le plus profond du monde. La ligne, qui a coûté au total 12 milliards de dollars, soit 13,8 milliards d'euros aujourd’hui, inflation comprise, a ouvert en 2016.
L’idée de relier l’Angleterre à la France par la Manche existe depuis des siècles. Un autre tunnel a d'ailleurs été envisagé, parmi les nombreux projets mis sur la table, mais ce n’est qu’en 1984 que les deux pays s'accordent pour construire un tunnel de 51 km. Quatre ans plus tard, 11 tunneliers sont dépêchés sur le chantier et trois galeries distinctes sont forées (une pour chaque sens de circulation et un tunnel de service), totalisant 152 km d’excavation.
Au plus fort du chantier, 15 000 ouvriers travaillent sur le projet, creusant la roche depuis chaque rive, jusqu’à la jonction symbolique du 1ᵉʳ décembre 1990. Les dépenses quotidiennes ont dépassé les 3,5 millions d'euros, et le coût total du projet, achevé en 1993, s’est élevé à 68 milliards de francs, soit 14 milliards d'euros actuels.
Plus connu sous le nom de « Big Dig », le Central Artery Tunnel de Boston est l’un des projets d’infrastructure les plus ambitieux des États-Unis, car il associe des tunnels immergés et creusés. Réalisé entre 1991 et 2006, ce chantier colossal visait à remplacer l’ancienne autoroute surélevée du Central Artery qui traversait la ville.
Les autorités ont ainsi conçu une série de projets visant à améliorer la circulation en créant une autoroute souterraine pour réduire les embouteillages. Le nouvel axe routier s’étend sur 13 km, dont près de la moitié en tunnels, et a nécessité de surmonter d’innombrables défis techniques, ce qui en fait l’un des projets les plus complexes jamais entrepris dans le pays. Il s’agit aussi de l’un des plus coûteux, avec un budget final de 14,8 milliards de dollars, soit 20 milliards d'euros actuels.
Baptisée Crossrail durant sa conception et sa construction, l’Elizabeth Line, qui traverse le centre de Londres jusqu’à différentes banlieues, s’impose comme l’un des projets de tunnels les plus emblématiques. L’idée remonte à plus de cinquante ans, mais les travaux n’ont commencé qu’en 2009, nécessitant l’excavation de 42 km de tunnels et la construction de gares sous certains des quartiers les plus densément peuplés au monde.
Le creusement s’est achevé en 2015, mais l’ouverture complète de la ligne a été retardée à plusieurs reprises, jusqu’à son inauguration en mai 2022, à l’occasion du jubilé de platine de la reine. Avec un coût total de 25 milliards de dollars (21,5 Md€), il s’agit bien du projet le plus onéreux de cette liste.
Si ce diaporama vous a plu, ajoutez un like et cliquez sur Suivre pour ne rien manquer des articles signés loveMONEY.